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Un été à Tokyo
23 juillet 2007

Exilés et voyageurs

Ca fait presque un mois que nous sommes au Japon, et il faut bien avouer que nous n'avons pas du tout le mal du pays. Comme on se sent plus léger, à l'autre bout du monde et presque sans bagages! Je ne pensais pas que ce serait si facile de tout quitter - ça l'est sans doute d'autant plus qu'une maison nous attend, à notre retour en France...

Je me prends à penser à tous ces exilés dont j'ai tant entendu parler par mes parents. Ces gens qui ont dû tout abandonner - maison, travail, biens, conjoint et enfants parfois - pour partir en catastrophe du Vietnam à la fin de la guerre. Ces familles éclatées sur tous les continents... Moi-même, j'ai des parents éloignés en France, aux Etats-Unis, au Canada, en Australie, au Brésil, en plus de ceux restés au pays. Jusqu'ici, l'évocation de cette séparation m'avait toujours fendu le coeur. Je ne pouvais y penser sans ressentir une vive déchirure, sans entrer en empathie avec ceux qui avaient dû reconstruire leur vie entière ailleurs - certains avec beaucoup de réussite. Aujourd'hui, je me dis que j'ai peut-être surestimé le poids d'un tel destin; que peut-être, tous ces gens sont partis sans un regard en arrière, forts et courageux précisément parce qu'ils étaient sûrs de trouver mieux devant eux. Oui, aujourd'hui je crois que ce changement de vie est possible, qu'on peut partir sans regret. Laisser tout derrière, et en être soulagé...

Palier_069 Palier_nuit_Iidabashi_002
Vue sur Tokyo depuis notre palier

C'est par une nuit d'hiver que nous avons décidé ce voyage au Japon. Nous ne trouvions pas le sommeil, l'esprit agité par mille pensées parasites. A cinq heures du matin, nous nous sommes retrouvés dans le salon à mettre notre vie sur la table et faire les constats suivants: nous étions en train de nous étioler, la routine était en train de miner notre inspiration artistique, et nous avions besoin d'un grand changement.

- "Je ne sais pas, moi! A la limite, un truc comme partir en Inde dans un ashram pendant six mois!, ai-je lancé à moitié sérieuse, à moitié en plaisantant.
- Ah ouais... Et pourquoi pas, après tout?", a répondu Pierre, saisissant l'idée au vol.

Dans ma tête, un rayon de soleil a percé les nuages. Jusque là, assoiffés de découvertes, nous avions toujours fait des voyages-marathons, multipliant les étapes au cours d'un même périple. A peine tombés sous le charme d'un lieu, nous repartions vers d'autres aventures, toutes aussi séduisantes mais toutes aussi frustrantes par leur brièveté. Combien de fois avais-je exprimé le désir de voyager autrement, de nous poser, enfin, et de savourer lentement? Envie de vivre un pays au rythme du quotidien, parmi ses habitants, suivant le mode de vie local!

Cette nuit-là, nous avons évoqué le Canada, qui s'est souvent retrouvé dans nos projets de voyages, mais qui nous sembla trop proche de ce que nous connaissions, trop occidental pour le coup! Très vite, le Japon s'est imposé par son caractère fascinant et paradoxal. Cet Orient exotique nous était curieusement familier à travers les films et les séries télé. Il évoquait un parfum d'enfance, alors même que nous n'y avions jamais mis les pieds. Ah, voir le Tokyo de Blade Runner, celui de Maison Ikkoku, les gratte-ciel et les pachinko! Depuis très longtemps, nous en avions tous deux envie mais ça avait toujours été reporté avec une sorte de crainte respectueuse. C'est un pays qui vivrait bien en autarcie s'il le pouvait, et qui ne s'ouvre que très progressivement au tourisme étranger. Les voyages organisés par les agences sont hors de prix. Et comment se débrouiller sans connaître la langue, sans lire les idéogrammes?

Nous avons fait ce pari - je me disais qu'en quelques mois, j'aurais bien le temps d'apprendre quelques rudiments de japonais... erreur, d'ailleurs! razz2 J'ai acheté le Lonely Planet et le Petit Futé; je les ai lus en long, en large et en travers; j'ai épluché les informations, pris des notes, évalué le budget. Pour des raisons de visa, nous avons réduit notre ambition de six mois à trois. D'habitude, je programme les voyages avec une précision maniaque: les hébergements, les restaurants, les sites à visiter, les événements auxquels assister, les itinéraires optimaux, la durée des trajets... Mais essayer de planifier trois mois de séjour m'a vite donnée le tournis. C'était impensable (et pas forcément souhaitable)! Certaines informations n'étaient accessibles que sur place; certaines escapades étaient tributaires de la météo, dans ce pays sujet aux ouragans d'été. Pour la première fois, j'ai dû accepter de ne pas pouvoir tout contrôler à l'avance, et de laisser une marge à l'improvisation... rendue possible et confortable par la durée de notre séjour! wink

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Commentaires
P
LOL ma petite mangouste! J'ai oublié de préciser aussi: à une saison ou dans un pays où il fait moins chaud! xD
T
Ca te dirai le désert du Kalahari ? :D
P
Peut-être, qui sait...? Mais dans d'autres conditions (un logement plus grand, un pays francophone ou anglophone où lier connaissance puisse être facile). ;)
T
Voilà qui éclaire un peu notre lanterne sur les origines de cette grande aventure :)<br /> Vous seriez prêt a remettre ça ailleurs pour 3 ou 6 mois ?
A
Je lis toujours avec grand intérêt tes articles, C'est intéressant de connaitre le début de cette aventure, d'où est venu le projet.
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